La Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence favorable au salarié en jugeant que le licenciement d’un salarié qui dénonce des faits de harcèlement qu’il décrit précisément, sans toutefois les qualifier explicitement de « harcèlement moral » est nul, le grief emporte à lui seul la nullité du licenciement.
Le harcèlement moral est défini par l’article L.1152-1 du Code du travail de la manière suivante :
« Aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel »
L’article L.1152-2 du même Code offre une protection au salarié en disposant que :
« Aucune personne ayant subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou ayant, de bonne foi, relaté ou témoigné de tels agissements ne peut faire l’objet de mesures mentionnées à l’article L.1121-2 ».
Sont notamment visées de mesures discriminatoires ou de licenciement à l’encontre du salarié.
L’article L1152-3 sanctionne toute rupture de contrat de travail intervenues en méconnaissances relatives au harcèlement moral par la nullité :
« Toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-1 et L.1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ».
En outre l’employeur est tenu de mettre en place des mesures de prévention quant au risque de harcèlement moral :
« L’employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral »
La charge de la preuve du harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié, lequel est uniquement tenu de présenter des éléments qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral. Ce principe est édicté par l’article L.1554-1 du Code du travail et confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation :
« Lorsque survient un litige (…) le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ».
La DEEETS a rédigé une note d’information concernant le harcèlement moral à destination des employeurs et des salariés. Elle donne des exemples de manifestations non cumulatives du harcèlement moral :
Un salarié qui subit une situation de harcèlement moral, parfois discriminatoire, est généralement en souffrance au travail. Le harcèlement moral peut dégrader la santé physique et ou mentale du salarié qui la subie au travail.
Un salarié victime de harcèlement moral a tout intérêt à dénoncer ces actes de harcèlement et à solliciter les conseils d’un avocat spécialisé en droit du travail. Il est également important que le salarié se ménage les preuves nécessaires à la constitution de son dossier.
Dans sa position antérieure, la Cour de cassation jugeait indispensable que le salarié victime de harcèlement moral qualifie lui-même juridiquement les faits qu’il affirme avoir subi.
En ce sens l’arrêt de la Cour de cassation du 13 septembre 2017 n°15-23.045 a censuré la décision de Cour d’appel ayant prononcé la nullité du licenciement en faveur du salarié au motif que :
« Le salarié n’avait pas dénoncé des faits qualifiés par lui d’agissements de harcèlement moral »
La Cour de cassation a assoupli sa position dans un arrêt du 19 avril 2023 n°21-21.053. Désormais, lorsqu’un salarié dénonce une situation de harcèlement moral, il n’est plus nécessaire de mentionner les termes « harcèlement moral ». La Cour a jugé en ces termes :
« Le salarié qui dénonce des faits de harcèlement moral ne peut être licencié pour ce motif, peu important qu’il n’ait pas qualifié lesdits faits de harcèlement moral lors de leur dénonciation, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter que de la connaissance par le salarié de la fausseté des faits qu’il dénonce ».
« Le grief tiré de la relation par l’intéressé d’agissements de harcèlement moral emportait à lui seul la nullité du licenciement ».
En conclusion comme le souligne Mme BERRIAT, Première Avocat Générale, « si l’objectif poursuivi en 2017 était d’éviter une instrumentalisation de la règle posée par les articles L.1152-2 et L.1152-3 du Code du travail, l’évolution proposée paraît plus efficace en ce qu’elle renforce le pouvoir d’appréciation du juge du fond au lieu de soumettre la solution du litige aux mots choisis par le salarié, lesquels dépendent plus des connaissances juridiques dont il dispose que des agissements subis ».
Vous êtes salarié ? Vous êtes victime ou dénoncez des faits de harcèlement moral ?
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Pour plus de précision, nous vous invitons à consulter la « lettre de la chambre sociale » de mars-avril 2023 ainsi que l’avis rendu par Mme BERRIAT, Première Avocat Générale.
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