Notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail côté salarié a représenté une salariée victime d’une situation de harcèlement sexuel. Nous avons sollicité des dommages et intérêts suite à la suite de son licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle.
La salariée a été embauchée le 24 novembre 2014 par un centre LECLERC, en qualité de manager, statut cadre, niveau 7, suivant contrat à durée indéterminée régi par la convention collective nationale du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire.
Compte tenu de sa charge de travail excessive la salariée avait accompli de nombreuses heures supplémentaires.
La salariée a été placée en arrêt maladie à la suite d'un burn out, lequel a été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) au titre de la législation relative aux maladies professionnelles.
Compte tenu de la dégradation de son état de santé, lié aux conditions de travail, le médecin du travail l’a déclarée inapte.
À l’issue de la visite de reprise le médecin du travail a considéré, à la suite de son examen médical, que le maintien du salarié à son poste de travail était impossible : « Inapte à la reprise de son poste de manager de rayon catégorie cadre et à tous postes dans l'entreprise. Aucun aménagement, adaptation ou transformation de poste n'est susceptible de rétablir l'inaptitude ».
À la suite de l’avis d’inaptitude dispensant l’employeur de son obligation de reclasser le salarié, l’employeur a diligenté la procédure de licenciement. L’employeur a convoqué la salariée inapte à un entretien préalable au licenciement pour inaptitude.
La salariée a été licenciée pour inaptitude avec impossibilité de reclassement, consécutive à une situation de harcèlement sexuel au travail.
La CPAM a notifié un taux d’incapacité permanente de 28 % à notre cliente, en raison des séquelles liées à son burn-out.
Compte tenu des circonstances dans lesquelles la rupture du contrat de travail est intervenu et de son préjudice d’une extrême gravité la salariée s’est rapprochée de notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail.
Notre cabinet d'avocat spécialisé en droit du travail a saisi le Conseil de prud’hommes par requête afin de faire reconnaitre le harcèlement sexuel et obtenir des dommages et intérêts à l’encontre du Centre LECLERC.
Le licenciement pour inaptitude d’origine professionnelle étant consécutif à une situation de harcèlement sexuel nous soutenions que le licenciement était nul. La dégradation de l’état de santé notre cliente étant en lien avec les conditions de travail.
Nous sollicitions également le règlement des heures supplémentaires majorées accomplies ainsi que le règlement des repos compensateurs.
Le Conseil de prud’hommes de Bayonne a partiellement fait Droit à la demande de la salariée.
Notre cabinet d’avocats a interjeté appel de la décision prud’homale.
La Cour d’appel a fait droit aux demandes de la salariée, s’agissant du harcèlement sexuel, la Cour a considéré que le licenciement pour inaptitude était injustifié et l’a déclaré nul.
S’agissant des demandes au titre du temps de travail, la Cour a annulé la convention de forfait et a condamné le Centre Leclerc au paiement des heures travaillée par la salariée avec majoration du salaire.
La Cour d’appel de Pau a condamné le Centre LECLERC a des dommages et intérêts considérant qu’il y avait bien eu harcèlement sexuel.
L’article L 1153-1 du code du code du travail dispose :
“Aucun salarié ne doit subir des faits :
1 / Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à la dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2 / Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers”.
Conformément à l'article L.1153-5 du Code du travail, l'employeur prend toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner dans les lieux de travail ainsi ou à la porte des locaux où se fait l'embauche.
L'article L 1154-1 du Code du travail prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné doit établir des faits qui permettent de supposer l'existence d'un harcèlement sexuel et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
La salariée fait valoir qu'elle a fait l'objet de harcèlement sexuel de la part de M. YY, technicien de ménage au sein du magasin. L'employeur admet que la personne, désignée comme auteur de harcèlement sexuel à l'égard de la salariée, soit M. YY, est salarié de l'entreprise.
Il résulte de ces éléments qu'il existait bien une relation de travail entre M. YY et la salariée.
La salariée produit notamment au dossier :
1 / Son audition devant l'enquêteur de la caisse primaire d'assurance maladie où elle indique « à de nombreuses reprises, c'était presque du quotidien, ce monsieur s'est permis de me dire que mon pantalon me faisait « un joli cul ». Il m'a même fait une fois cette réflexion devant le directeur et la standardiste. M. Y, en souriant, lui a dit « c'est bon XX ça suffit maintenant ». Une fois XX s'est adressé à moi en criant devant les clients « on ne s'est pas baisés aujourd'hui…/… ».
2 / Le procès-verbal d'audition par la caisse primaire d'assurance maladie de M. YY qui indique « il est vrai que XX fait des réflexions à tout le monde mais les gens le prennent plutôt bien. Il exagère parfois, tout le monde le connaît... Je confirme les dires de la salariée concernant une réflexion faite par XX devant moi. Je confirme également avoir dit à la salariée l'origine du surnom que lui avait attribué YY ».
Ces éléments, pris dans leur ensemble, établissent des faits qui permettent de supposer l'existence d'un harcèlement sexuel à l'égard de notre cliente. Il incombe à l'employeur, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement. Il résulte des éléments produits par l'employeur qu'il est exact que la salariée a fait l'objet de propos verbaux à connotation sexuelle non désirés.
Au-delà de la grossièreté relevée par certains « attestants », il convient de remarquer que le surnom de Catherine Ringer, associé à son passé d'actrice pornographique, dénote avec les autres sobriquets utilisés par M. YY vis à vis d'autres salariées (comme par exemple « miss », « mouche » ou « paysanne »).
L'utilisation quotidienne de ce surnom, associé aux autres phrases prononcées telles que le fait que « ton pantalon te fait un joli cul » ont contribué à créer chez la salariée un environnement intimidant et dégradant ayant eu pour effet de porter atteinte à sa dignité.
Le psychiatre ayant examiné la salariée, évoque « des propos insultants créant une blessure narcissique fortement douloureuse ». La salariée a été victime de propos sexistes répétés qui ont porté atteinte à sa dignité.
L’employeur, témoin de ces faits, a pris la décision de laisser perdurer les pratiques. Les faits dénoncés par la salariée sont donc bien constitutifs de harcèlement sexuel. À ce titre, la Cour d’appel a condamné le Centre LECLERC à payer 10.000 € à la salariée.
La salariée formulait, également, des demandes au titre de son temps de travail et sollicitait le paiement de ses heures supplémentaires.
Sur la demande au titre des heures supplémentaires, la Cour a tout d’abord examiné la validité de la convention de forfait jour.
La régularité d'une convention de forfait en jours doit s'analyser au regard de l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, l'article L. 3121-39 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2008-789 du 20 août 2008, interprété à la lumière des articles 17, § 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.
Le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles.
Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.
Le contrat de travail signé entre les parties prévoit, dans la partie « rémunération » les éléments suivants :
1 / « Compte tenu de l'autonomie inhérente à la fonction et du niveau de responsabilités, vous ne pourrez être soumise à l'horaire collectif de travail du rayon que vous dirigez. Conformément à l'accord collectif qui le prévoit vous serez soumise au forfait annuel en jours dans les conditions prévues par cet accord. En conséquence la durée annuelle de travail sera égale à 216 jours travaillés, ce que vous acceptez. Ce forfait correspond à une année complète de travail et est calculé sur la base d'un droit intégral à congés payés. En cas de dépassement de ce forfait annuel, après affectation éventuelle des jours à un compte épargne temps et déduction des congés payés, vous bénéficierez, au cours des trois premiers mois de l'année suivante, d'un nombre de jours de repos égal à ce dépassement. Ces jours de repos s'imputeront sur le forfait annuel en jours de l’année au cours de laquelle ils seront pris. Vous disposez d'une totale liberté dans l'organisation de votre temps de travail à l'intérieur de ce forfait annuel sous réserve de respecter les règles légales relatives au repos quotidien et au repos hebdomadaire. Vous vous conformerez aux modalités de décompte du nombre de jours travaillés actuellement en vigueur dans l'entreprise. Vous percevrez un salaire brut mensuel de 2.500 €. Cette rémunération forfaitaire sera versée indépendamment du nombre de jours travaillés dans le mois. Cette rémunération couvre l'ensemble des heures de travail que vous pourrez être amenée à effectuer dans l'exercice de vos fonctions ».
2 / Ces dispositions se limitant à prévoir, s'agissant du suivi de la charge et de l'amplitude de travail du salarié concerné, un entretien annuel avec le supérieur hiérarchique et l'établissement d'un document récapitulant leur présence sur l'année, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.
L’accord collectif étant irrégulier, la Cour en a déduit que la convention de forfait en jours, signée par les parties sur le fondement d'un accord invalidé doit nécessairement être annulée. Dans ces conditions le régime dérogatoire prévu dans la convention de forfait en jours étant écarté, il convient de revenir à un décompte de la durée du travail selon les règles du droit commun, la salariée pouvant prétendre au paiement d'heures supplémentaires.
Au vu des éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le Juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées du code du travail. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
La salariée produit au dossier, notamment, l'enquête administrative de la caisse primaire d'assurance maladie retraçant les différentes auditions de salariés faisant état des horaires de travail de la salariée, des contraintes liées aux travail certains dimanche, des permanences et des implantations de nuit.
La salariée produit également différentes attestations de salariés faisant état de ces heures travaillées.
Au vu des éléments produits par la salariée, la Cour a la conviction que la salariée a effectué des heures supplémentaires qu'il convient d'évaluer à la somme de 23.330 € outre celle de 2.333 € au titre des congés payés afférents.
La Cour alloue, également, au titre de la contrepartie obligatoire en repos, la somme de 11.660 € ainsi que celle de 1.166 € au titre des congés payés afférents à la salariée.
Ainsi il est démontré que l'employeur n'a aucunement justifié avoir, concernant s'agissant du suivi de la charge et de l'amplitude de travail du salarié, pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail de la salariée restaient raisonnables et assuraient la protection de sa sécurité et de sa santé.
L'employeur n'a pas pris, conformément à l'article L.1153-5 du Code du travail, toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir des agissements de harcèlement sexuel et a laissé les comportements de M.YY perdurer au sein de l'entreprise.
Si la salariée a déjà été indemnisée des conséquences du harcèlement sexuel subi, les sommes allouées à ce titre n'ont pas réparé le préjudice résultant de l'absence de prévention par l'employeur des faits de harcèlement sexuel.
Ces agissements constituent incontestablement des manquements à l'obligation de sécurité prévue à l'article L.4121-1 du Code du travail. Compte tenu des pièces médicales et sociales du dossier, le préjudice de la salariée doit être évalué à la somme de 15.000 €.
Selon la convention collective applicable au présent litige, tout travail entre 21 heures et 5 heures est considéré comme travail de nuit et donne lieu à une majoration de 20% du salaire horaire de base.
Il a déjà été justifié plus haut, par l'attestation de Mme Z, que la salariée a pu commencer à travailler entre 5 heures et 6 heures du matin dans la proportion visée.
La Cour alloue 2.200 € à la salariée au titre de la majoration des heures de nuit.
La preuve du respect des seuils prévus par le Droit de l'Union Européenne et des durées maximales de travail, fixées par le droit interne et de respect de temps minimal de repos incombe à l'employeur.
Il est démontré par les différentes attestations déjà évoquées et le tableau des jours travaillées par la salariée, que la salariée a, par exemple, travaillé au mois d'août 2015, 22,5 jours alors même que ce mois comporte 24 jours ouvrables.
Faute d'avoir respecté les seuils de durée hebdomadaire de travail de 48 heures et de la durée minimale de repos, ce seul constat ouvre droit à la réparation du fait qu'il prive la salariée d'un repos suffisant.
La Cour alloue, à la salariée, la somme de 3.000 € au titre du non-respect de la durée légale du travail et celle de 3.000 € au titre du non-respect du temps de repos.
Le médecin du travail a prononcé une inaptitude à tout poste.
Le CRRMP a considéré qu’il y avait bien un lien direct et essentiel entre la dégradation de l’état de santé de la salariée et ses conditions de travail.
Les règles protectrices des victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette maladie ou cet accident lors du licenciement.
Il convient d'apprécier la réalité du caractère professionnel de l'accident ou la maladie et de sa connaissance ou non par l'employeur de ce caractère en fonction des circonstances propres à l'espèce et des éléments de preuve soumis.
Il résulte des pièces du dossier les éléments suivants :
Le syndrome anxiodépressif développé, à partir de 2016, est totalement lié à ses conditions de travail à la gestion par l'entreprise de sa charge de travail et a été victime de harcèlement sexuel au sein de l'entreprise où elle exerçait ses fonctions.
L'inaptitude de la salariée a donc, au moins partiellement, pour origine sa maladie professionnelle en l'absence totale d'antécédents psychiatriques et d’événements étrangers au travail.
Il est clair, au vu des différentes pièces médicales du dossier, que le harcèlement sexuel a constitué qu'une composante du stress au travail ayant justifié son arrêt de travail puis la reconnaissance de sa maladie professionnelle.
Ainsi, l’inaptitude de la salariée est la conséquence directe des agissements de harcèlement sexuel, l’employeur ne peut donc pas justifier le licenciement pour inaptitude. Dans ces conditions, la Cour a déclaré le licenciement pour inaptitude, nul.
En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que les premiers juges, par des motifs pertinents qu'elle adopte, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties au regard des demandes de reliquat d'indemnité de licenciement et d'indemnité compensatrice de préavis.
Il convient donc de confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu'il a condamné l'employeur à payer à la salariée sommes suivantes :
Conformément à l'article L.1235-3-1 du code du travail la salariée peut prétendre à une indemnisation de son entier préjudice qui doit être évalué, compte tenu de sa situation personnelle, médicale et sociale, de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à retrouver un emploi la somme de 35.000 €.
Sur l'application de l'article L.1235-4 du code du travail.
Il convient de condamner l'employeur à rembourser à Pôle Emploi les sommes dues à ce titre, dans la limite de six mois d'indemnités.
En cas de rupture du contrat de travail, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de congés acquis non pris alors qu'il a été dans l'impossibilité de prendre ses congés au cours de la période prévue du fait de son arrêt de travail.
Il est certain que la salariée est demeurée en arrêt de travail du 19 août 2016 jusqu'à son licenciement. La salariée a donc droit une indemnité compensatrice de congés payés d'un montant, non discuté en son quantum par l'employeur, de 7.081,25 €.
La Cour d’appel a condamné l’employeur à verser à l'article 700 du code de procédure civile la somme de 3.000 € à la salariée.
Par ces motifs la Cour dans son dispositif :
La Cour condamne le Centre LECLERC à payer à la salariée les sommes suivantes :
Soit un montant total de 116.764,25 euros.
Vous êtes salarié(e), vous avez été victime d’une situation de harcèlement sexuel, vous avez été licencié(e) pour inaptitude d’origine professionnelle, insuffisance professionnelle, motif économique, faute grave, etc … n’hésitez pas à contacter notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail côté salariés.