Le licenciement pour inaptitude requalifié en licenciement sans cause réelle

L’absence de consultation des délégués du personnel constitue une violation des garanties de fond

Notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail dans la défense des salariés a obtenu la condamnation de l’employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Notre cliente a été embauchée en mai 1996 par un Office de tourisme en EPIC, en qualité d'agent d'accueil et de renseignements, suivant contrats à durée déterminée saisonniers régi par la Convention Collective Nationale des Organismes de tourisme.  

Le contrat a été transformé en contrat à durée indéterminée le 1er janvier 2001.  

Au moment de la rupture de son contrat de travail la salariée occupe le poste de Comptable gestion administrative des ressources humaines et Responsable de la centrale de réservation, statut agent de maîtrise, coefficient 2.3, indice 1836.  

La salariée est placée en arrêt de travail à plusieurs reprises à compter du mois de décembre 2015.

Le 7 novembre 2017, le médecin du travail l’a déclaré inapte à son poste en application de l'article L.4624-4 du Code du travail en mentionnant « inapte au poste, apte à un autre.  La salariée pourrait travailler dans un poste sans avoir trop de responsabilités.  La salariée pourrait effectuer un travail physique léger en faisant, par exemple un travail à l’accueil ».  

Le 28 novembre 2017, l’Office de tourisme lui a proposé deux postes de reclassement avec maintien de salaire. La salariée les a refusés.  

Le 29 mai 2018, la salariée a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé le 6 juin 2018.  

Le 21 juin 2018, l’employeur lui notifie son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.  

Le 7 décembre 2018, la salariée estimant son licenciement abusif a saisi la juridiction prud’homale afin de solliciter des dommages et intérêt à l’encontre de son ancien employeur. 

La salariée sollicitait l’absence de cause réelle de son licenciement, l’employeur n’ayant pas sollicité l’avis des délégués du personnel, ce qui constitue la violation d’une garantie de fond en l’absence d’organisation d’élections depuis 2010 et de procès-verbal de carence.  

Le 11 octobre 2019, la salariée a interjeté appel de ce jugement.

La Cour d’appel fait droit aux demandes de la salariée et requalifie le licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamne l’employeur à verser les dommages et intérêt à la salariée.    

Sur l’absence de cause réelle et sérieuse

Conformément à l'article L. 1226-2 du code du travail, dans sa version applicable à compter du premier janvier 2017, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail en application de l'article L. 4624-4 à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel appartient le cas échéant, situé sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. 

Pour celà, il faut :

- Que la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions défîmes aux articles L.233-1 et suivants du code du commerce ;  

- Que la proposition prenne en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ;  

- Que le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté ;  

- Que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutation, aménagements, adaptation ou transformation de poste existants ou aménagement du temps de travail ;  

- Que l'élection des délégués du personnel avec suppléant soit obligatoire dans tous les organismes, occupant au moins 5 salariés, et relève de l'initiative de l'employeur et intervient à la même date que celle du comité d'entreprise si celui-ci existe.  

La consultation des délégués du personnel ou du comité social et économique constitue, en matière d'inaptitude non professionnelle, une formalité substantielle et donc une règle de fond dont sa méconnaissance prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.  

Il résulte des dispositions concernant le comité social et économique prévues par l'ordonnance n° 2017-1386 en date du 22 septembre 2017 :  

- Que le comité social et économique est mis en place au terme du mandat des délégués du personnel ou des membres élus du comité d'entreprise, de la délégation unique du personnel, de l'instance regroupée mise en place par accord du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, lors du renouvellement de l'une de ces institutions, et au plus tard le 31 décembre 2019 ;  

- Que le comité social et économique est mis en place dans les entreprises d'au moins 11 salariés et est applicable aux employeurs de droit privé, aux établissements publics à caractère industriel et commercial et aux établissements publics à caractère administratif lorsqu'ils emploient du personnel dans les conditions du droit privé ;  

-  La mise en place du comité social et économique n’est obligatoire que si l’effectif d'au moins 11 salariés est atteint pendant 12 mois consécutifs.    

Il résulte de l'examen de l'ensemble des pièces produites au dossier, par l'employeur que :

- Aucune consultation des instances représentatives du personnel n'a été réalisée concernant le reclassement de la salariée ;

-  Aucun élément ne permet de connaître, conformément aux règles prescrites par l'article L. 1111-2 du code du travail, ['effectif réel de l'entreprise au moment du déclenchement de la procédure de licenciement. Si l'employeur fait état dans ses écritures du fait que l'entreprise comptait moins de 11 salariés, il ne conteste nullement le fait que celle-ci comptait au moins cinq salariés ;

- Aucun procès-verbal de carence des élections de représentants du personnel au dossier ne permet d’établir que l'employeur a respecté ses obligations en matière d'élections professionnelles. 

La salariée produit au dossier une attestation de M. X qui indique :

« En ma qualité de conseiller municipal de X, j'ai intégré le comité de direction de l’Office du tourisme municipal le 5 mai 20 1 5. J'ai appris par ma belle-sœur, début mai 2017, qu'il n'y avait pas de délégué du personnel au sein de l’Office du tourisme depuis plusieurs années, élément confirmé par deux membres du personnel. Je suis intervenu en séance du comité de direction de l’Office le 13 décembre 2017 pour faire un rappel de la réglementation en vigueur en la matière et demander la mise en place d’une délégation du personnel. J'ai évoqué à nouveau cette demande en séance du 16 janvier 2018 et du 4 avril 2018 et je sais que ce point a été évoqué en mon absence en séance du 19 septembre 2018. Il est mentionné sur le compte rendu que la démarche est en cours ».  

La salariée produit également au dossier un document d'évaluation de l’Office du tourisme, rédigé par la salariée Y, que l'entreprise compte, au 12 octobre 2017,11 salariés ainsi que des saisonniers.

L'employeur, alors qu'il avait l'obligation conventionnelle d'organiser des élections aux fins d'élire les représentants du personnel au vu de l'effectif de l'entreprise et qu'il s'est dispensé de la mise en place d'un comité social et économique, n’est nullement libéré de son obligation de consultation des représentants du personnel ou du comité social et économique sur les possibilités de reclassement de la salariée suite à sa déclaration d'inaptitude non professionnelle.

En conséquence le licenciement de la salariée se trouve dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse  

Sur l’indemnité compensatrice de préavis  

Le licenciement de la salariée étant dépourvu de cause réelle et sérieuse du fait du manquement de l'employeur à son obligation de reclassement, la consultation des délégués du personnel constituant une composante de ce processus, une indemnité compensatrice de préavis et donc due.  L’employeur est condamné à verser la somme de 5.085,02 € à ce titre ainsi que celle de 508,50 € au titre des congés payés afférents.    

Sur les dommages et intérêts

En vertu de l'article L 1253-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, dont les dispositions sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de ladite ordonnance, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux.   

La salariée était âgée de 63 ans, avait une ancienneté de 17 ans au jour de son licenciement dans la relation contractuelle à durée indéterminée et 22 ans de présence au sein de l'entreprise du fait des différents contrats saisonniers conclus antérieurement (sur des périodes de 5 mois jusqu'en 1998 et à plein temps à compter de 1999.  

Compte tenu de sa situation personnelle, sociale et familiale l’employeur est condamné à verser à la salariée la somme de 40.000 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.      

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation des dispositions relatives à la représentation du personnel  

L'employeur n'a pas organisé d'élections de représentants du personnel depuis 2010 alors même que la convention collective applicable lui en faisait l'obligation.  

Que la salariée s'en est ouverte au conseiller municipal de la commune de X sur ce point.  

Les différents arrêts de travail, le dossier médical de la salariée, et son courrier adressé au médecin du travail du 8 novembre 2017 témoignent du fait que la salariée a pu être en souffrance au travail depuis 2016 sans jamais pouvoir s'adresser un représentant du personnel ayant pour mission de participer à la détermination collective des conditions de travail et de la gestion au sein de l'entreprise. 

Compte tenu du préjudice subi, il est alloué de 2.000 € à la salariée.

Sur la demande au titre des congés acquis pendant les périodes d'arrêt de travail

En cas de rupture du contrat de travail, le salarié a droit à une indemnité compensatrice de congés acquis non pris. Lorsque le salarié a été dans l’'impossibilité de prendre ses congés au cours de la période prévue du fait de son arrêt de travail.  

L’employeur est condamné à verser 2.542,51 €au titre des congés acquis pendant les périodes d'arrêt maladie. 

L’employeur est également condamné à verser 2.000 € au titre de l’article 700.  

Le montant total des condamnations s’élève donc à la somme de 52.136 €.       

Vous êtes salarié, vous avez été licencié pour inaptitude, motif économique, faute grave ou insuffisance professionnelle, n’hésitez pas à contacter notre cabinet d’avocats pour plus d’informations.

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