La loi SAPIN II avait permis de créer le statut de lanceur d’alertes afin de renforcer la lutte contre la corruption.
Toutefois, la protection des lanceurs d’alertes était peu efficace.
En effet, la Loi du 6 décembre 2016 avait prévu une alerte en trois temps :
Instauré comme préalable d’avertir, tout d’abord, son employeur public ou privé, a montré ses limites.
Le lanceur d’alerte, l’auteur du signalement étant, bien souvent, sanctionné pour avoir divulgué des informations.
En effet il arrivait fréquemment que des salariés lanceurs d’alertes subissent des représailles, menaces, pressions, procédures judiciaires, licenciements.
Le salarié s’exposait souvent à une sanction disciplinaire voir à un licenciement pour faute grave pour avoir effectué un signalement à son supérieur hiérarchique. Le dispositif d’alerte issue de la loi SAPIN II prévoyant que le signalement devait tout d’abord intervenir en interne.
Certains lanceurs d’alertes sont également confrontés à une perte d’employabilité, à des campagnes de dénigrements suite aux révélations faites.
La directive Européenne d’octobre 2019, sur la protection des personnes signalant des violations du Droit de l’Union, devant être transposée en Droit français, le parlement en a profité pour améliorer la protection des lanceurs d’alertes.
Députés et Sénateurs, à l’issue d’une Commission Mixte Paritaire (CMP) sont arrivés à un compromis sur la proposition de loi visant à améliorer la protection des lanceurs d’alertes.
Le 8 février, l’Assemblée Nationale a voté cette proposition de loi qui a été soumise au sénat le 16 février 2022.
La Loi SAPIN II avait créé ce statut, pensant servir l’intérêt général malheureusement, le dispositif d’alerte avait montré ses limites.
Une des principales innovations concerne les circuits de signalement.
Le lanceur d’alerte pourra désormais, au choix, divulguer ses informations à l’extérieur de l’entreprise, en saisissant la justice, en saisissant un défenseur des droits, en saisissant un ordre professionnel ou une autorité administrative, sans avoir, auparavant, prévenu son entreprise ou son administration.
Selon la nouvelle définition :
« un lanceur d’alerte est une personne physique qui signale ou divulgue , sans contrepartie financière directe et de bonne foi, des informations portant sur un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général, une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d’un acte unilatéral, d’une organisation internationale, pris sur le fondement d’un tel engagement du Droit de l’Union Européenne et de la Loi ou du règlement ».
La loi élargit la définition du lanceur d’alertes qui avait été posée par la Loi SAPIN II.
La révélation de l’information n’a plus à être faite « de manière désintéressée » mais seulement « sans contrepartie financière directe ».
Cela signifie désormais qu’un lanceur d’alerte pourra être rémunéré après coup.
De plus, la violation des textes n’aura plus à revêtir un caractère « grave et manifeste ».
En outre, le lanceur d’alertes ne doit plus avoir à justifier qu’il a eu personnellement connaissance des informations qu’il dénonce.
Si les personnes physiques ou morales aident le lanceur d’alertes à effectuer un signalement, ces « facilitateurs » bénéficieront également de la protection en lien avec le lanceur d’alertes.
L’article L1121-2 est introduit dans le Code du travail pour introduire un principe de non-discrimination en faveur du lanceur d’alerte.
En conséquence, les lanceurs d’alertes ne pourront plus être écartés d’une procédure de recrutement, licenciés ou sanctionnés, ni faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, pour avoir signalé ou divulgué des informations.
Désormais, toute procédure dirigée contre un lanceur d’alertes, en raison des informations signalées ou divulguées, pourra être sanctionnée si elle est jugée abusive ou dilatoire.
Une amende civile pourra être prononcée par les juridictions civiles ou pénales de 60.000 €.
De plus, le lanceur d’alertes pourra solliciter des dommages et intérêts pour procédure abusive ou dilatoire.
Enfin, les juridictions pourront prononcer les peines complémentaires d’affichage ou de diffusion de la décision.
Afin d’améliorer l’information des salariés, la loi oblige à compléter le contenu du règlement intérieur qui devra rappeler l’existence du dispositif de protection des lanceurs d’alertes, prévu par la loi SAPIN II.
La loi adoptée le 16 février 2022 charge le défenseur des droits d’une mission d’information, de conseil et d’orientation des lanceurs d’alertes.
Dans ce cadre, le Défenseur des droits pourra être saisi par toute personne pour rendre un avis, dans un délai de 6 mois, sur sa qualité de lanceur d’alertes ou sur la protection dont elle bénéficie au titre d’un autre dispositif de protection des auteurs de signalements notamment en tant que « facilitateur ».
C’est dans ce contexte que la Cour de Cassation a rendu un arrêt novateur renforçant la protection du salarié le 19 janvier 2022 :
« En raison de l'atteinte qu'il porte à la liberté d'expression, en particulier au droit pour les salariés de signaler les conduites ou actes illicites constatés par eux sur leur lieu de travail, le licenciement d'un salarié prononcé pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits dont il a eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions et qui, s'ils étaient établis, seraient de nature à caractériser des infractions pénales ou des manquements à des obligations déontologiques prévues par la loi ou le règlement, est frappé de nullité ».
Un salarié travaillant en qualité d'assistant au sein d’une société d'expertise comptable et de commissariat aux comptes alerte par lettre recommandée son employeur sur une situation de conflit d'intérêts entre ses missions d'expert-comptable et celles de commissaire aux comptes.
Il prévient qu'à défaut de pouvoir discuter de cette question, il saisira la compagnie régionale des commissaires aux comptes. Ce qu’il fait la veille de son entretien préalable au licenciement, à la suite duquel il est congédié pour faute grave.
« Ayant ainsi fait ressortir que le salarié avait été licencié pour avoir relaté des faits, dont il avait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions, et qui, s'ils étaient établis, seraient de nature à caractériser une violation du code de déontologie de la profession de commissaire aux comptes dans sa version issue du décret nº 2010-131 du 10 février 2010, et ayant estimé, sans dénaturation dès lors que l'employeur ne soutenait pas que le salarié avait connaissance de la fausseté des faits qu'il dénonçait, que la mauvaise foi de ce dernier n'était pas établie, elle en a exactement déduit que le licenciement était nul ».
En vertu de l’article L. 1132-3-3 du Code du travail aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire pour avoir « signalé une alerte » dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.
Vous êtes lanceur d’alerte, vous souhaitez être informé sur vos droits et notamment, les protections dont vous pourriez bénéficier, n’hésitez pas à contacter notre cabinet d’avocats spécialisé en Droit du travail.
Vous avez été licencié pour faute grave à la suite d’un signalement n’hésitez pas à nous contacter.
Nous assistons régulièrement des lanceurs d’alertes.