VILLEROY et BOCH condamnés à la suite d'un licenciement pour inaptitude

Le licenciement pour inaptitude requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse

Notre cabinet d'avocats, spécialisé en Droit du travail dans la défense des salariés à obtenu des dommages et intérêts à la suite de licenciement pour inaptitude

Vous êtes salarié vous êtes en arrêt maladie, vous avez été licencié pour inaptitude à la suite d'un épuisement professionnel, n'hésitez pas à contacter notre cabinet d'avocats spécialisé en droit du travail.

Notre cabinet d’avocats a obtenu la condamnation de la société Villeroy et Boch à verser des dommages et intérêts au salarié licencié.

Faits et procédure du licenciement

Le salarié a été embauché suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 17 septembre 1990 par la SAS Villeroy et Boch, en qualité de prospecteur, statut Etam.

Le 18 janvier 2001, le salarié était promu chef des ventes clients spéciaux, statut cadre, puis directeur des ventes de la région sud depuis le 1er janvier 2005.

La convention collective nationale de l’industrie céramique de France est applicable.

Le salarié a été placé en arrêt de travail pour maladie à partir du 23 mars 2017.

Le 14 novembre 2017, à l’occasion d’une visite médicale de reprise, le salarié était déclaré apte à son poste avec préconisations (réduire significativement la charge mentale liée au travail, prévoir une période de temps partiel thérapeutique).

Le 15 novembre 2017, il était de nouveau placé en arrêt de travail pour maladie.

Le 19 janvier 2018, le médecin du travail concluait à l’inaptitude du salarié.

La société Villeroy & Boch saisissait en référé le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins de voir annuler l’avis d’inaptitude émis le 19 janvier 2018.

Par ordonnance en date du 30 mars 2018, la formation de référé du conseil de prud’hommes de Toulouse annulait l’avis d’inaptitude du 19 janvier 2018, en raison de l’absence d’étude de poste préalable à l’avis.

Le 9 juillet 2018, la médecine du travail déclarait le salarié inapte en précisant que «tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé».

Par courrier du 16 janvier 2019, le salarié a été convoqué à un entretien préalable au licenciement, fixé le 25 janvier 2019.

Par courrier du 4 février 2019, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par requête en date du 3 juin 2019, le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse aux fins de contester son licenciement.

Par jugement du 20 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

  • jugé le licenciement de le salarié fondé sur une cause réelle et sérieuse,
  • déclaré la convention de forfait jours nulle et condamné en conséquence la SAS Villeroy et Boch, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, à payer au salarié les sommes de :
    • 58 446,80 euros au titre des heures supplémentaires outre 5 844,68 euros pour congés payés y afférents,
    • 20 573,55 euros au titre de l’indemnisation du repos compensateur, outre 2 057,35 euros pour congés payés y afférents,
    • 5 000 euros au titre du préjudice né de la violation du droit au repos,
  • rejeté le surplus des demandes des parties,
  • dit n’y avoir lieu à application de taux d’intérêt,
  • ordonné l’exécution provisoire de droit,
  • condamné la société Villeroy & Boch prise en la personne de son représentant légal ès-qualités aux entiers dépens,
  • condamné la société Villeroy & Boch prise en la personne de son représentant légal ès-qualités à payer au salarié la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le salarié a relevé appel de ce jugement le 1er juillet 2021.

La Cour d'appel a considérer que le licenciement du travail était sans cause rééelle et sérieuse.
En consequence elle a condamné l'employeur aux réglements de dommages et intérêts

Sur le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement

Le salarié déclaré inapte à son poste et à tout poste de l’entreprise par avis du médecin du travail du 9 juillet 2018, conteste le caractère réel et sérieux de son licenciement au motif que son inaptitude serait la résultante de la dégradation de ses conditions de travail et du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, dans la mesure où sa surcharge de travail lui a causé un épuisement professionnel ayant nécessité une prise en charge psychiatrique pendant plus de 13 mois.

Il explique que les objectifs assignés étaient déconnectés de la réalité et du fonctionnement de l’entreprise, avec un sous-effectif entraînant une surcharge de travail.

Il a été précédemment jugé que le salarié effectuait de très nombreuses heures supplémentaires et de fréquents déplacements, et que son temps de travail ne respectait pas les durées maximales de travail et les repos minimaux. De ce fait, il est caractérisé un manquement de l’employeur.

Si les alertes du comité d’établissement du 5 février 2016 et du 13 décembre 2016 ne visaient pas expressément M. [F], il n’en demeure pas moins que la société Villeroy et Boch était alertée d’une surcharge générale affectant plusieurs services et en particulier l’équipe commerciale.

Ce n’est que tardivement que l’employeur a réagi, en effet il fait valoir s’être adjoint les services d’une société Mercuri International spécialisée dans le développement pour accompagner les responsables des ventes dans le cadre d’un programme de formation en 2018, or il est rappelé que le salarié a été placé en arrêt maladie dès le 23 mars 2017 pour ne plus reprendre son poste, et qu’il ne bénéficiait d’aucun entretien individuel sur sa charge de travail et la compatibilité de celle-ci avec sa vie personnelle.

Par ailleurs, le salarié explique sans être contredit sur ce point que son assistante a été transférée à [Localité 7] en 2014 et qu’il ne disposait plus de bureau à compter de la fermeture de la direction France Sud en août 2015, ce qui augmentait conjointement sa surcharge de travail et son isolement.

Il produit le courrier détaillé par lequel il a alerté le médecin du travail sur ses difficultés et cette surcharge, ainsi que son mail adressé dans le même sens à la direction le 10 avril 2017.

Ainsi, dès cette date l’employeur était avisé du lien au moins partiel entre les difficultés professionnelles du salarié et la dégradation de son état de santé, le salarié étant en arrêt de travail depuis le mois de mars 2017.

Il résulte également des pièces produites aux débats que l’inaptitude médicale ayant conduit au licenciement est directement consécutive à cette dégradation de l’état de santé pour surmenage, le salarié produisant notamment à ce sujet les courriers adressés au médecin du travail par son médecin psychiatre les 20 octobre 2017, 18 janvier 2018 et 10 juin 2018 .

Ainsi, à la date du licenciement prononcé le 4 février 2019, l’employeur avait connaissance d’un lien au moins partiel entre l’inaptitude et les conditions de travail dégradées du salarié de sorte que, nonobstant l’absence de démarche par le salarié auprès de la CPAM pour obtenir la reconnaissance d’une maladie professionnelle, il y a lieu de considérer contrairement au jugement entrepris que l’inaptitude de M. [F] est d’origine professionnelle, laquelle justifie l’octroi au salarié de l’indemnité spéciale de licenciement de l’article L.1226-14 du code du travail.

Par ailleurs, l’inaptitude résultant directement des manquements de l’employeur relatifs au rythme de travail imposé au salarié, le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est sans cause réelle et sérieuse. Le jugement du conseil de prud'hommes sera infirmé en ce sens.

Sur les dommages et interêt allouer à la suite du  licenciement pour inaptitude

S’agissant des conséquences de cette rupture sans cause réelle et sérieuse, le salarié demande à la cour d’écarter le barème d’indemnisation fixé à l’article L1235-3 du code du travail en ce qu’il ne lui assurerait pas une réparation adéquate, et sollicite 250000 € à titre de dommages-intérêts.

L’article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l’autre partie.

Lorsque des dispositions internes sont en cause, comme en l’espèce, le juge du fond doit vérifier leur compatibilité avec les normes supra- nationales que la France s’est engagée à respecter, au besoin en écartant la norme nationale en cas d’incompatibilité irréductible.

Selon l’article 10 de la convention internationale du travail nº 158 sur le licenciement de l’organisation internationale du travail, qui est d’application directe en droit interne:

« Si les organismes mentionnés à l’article 8 de la présente convention arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n’ont pas le pouvoir ou n’estiment pas possible dans les circonstances d’annuler le licenciement et/ou d’ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée. »

Le terme 'adéquat’ doit être compris comme réservant aux États parties une marge d’appréciation.

Selon l’article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, dont les dispositions sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de ladite ordonnance, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, lorsque la réintégration est refusée par l’une ou l’autre des parties, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux.

Selon le tableau de l’article L 1235-3 du code du travail, pour un salarié tel qu’un salarié ayant 28 ans d’ancienneté dans une entreprise comprenant au moins 11 salariés, cette indemnité est comprise entre 3 et 19,5 mois de salaire brut.

La cour estime que l’indemnisation fixée par ce barème est de nature à assurer la réparation du préjudice né de la rupture du contrat de travail de manière adéquate, il n’y a donc pas lieu d’en écarter l’application.

Le salarié avait acquis 28 ans d’ancienneté, percevait en dernier lieu une rémunération de 8069,42 € bruts et était âgé de 54 ans lors de son licenciement, il est demeuré sans emploi et justifie de ses recherches actualisées au 14 novembre 2022, il est en fin de droits chômage.

Au regard de ces éléments, il sera alloué au salarié la somme de 155 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le salarié est par ailleurs fondé à obtenir les indemnités de rupture suivantes :

  • 3 mois de salaire à titre d’indemnité compensatrice de préavis soit 24 209,85 € bruts outre 2420,98 € bruts au titre des congés payés y afférents,
  • l’indemnité spéciale de licenciement de l’article L.1226-14 du code du travail correspondant au double de l’indemnité légale, soit 138 982,50 €, et dont il sera déduit l’indemnité conventionnelle de licenciement déjà perçue pour un montant de 111069,58 €, de sorte qu’il reste dû au salarié la somme de 27 912,92 €.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

Il sera fait application, par ajout au jugement entrepris, des dispositions de l’article L1235-4 du code du travail à l’égard de l’employeur, dans la limite de six mois d’indemnités chômage versées au salarié.

Sur la violation de l’obligation de sécurité

Dans le cadre de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur destinée notamment à prévenir les risques pour la santé et la sécurité des salariés, la loi lui fait obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Et l’article L.4121-1 du code du travail lui fait obligation de mettre en place :

  • des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,
  • des actions d’information et de formation,
  • une organisation et des moyens adaptés,

et de veiller à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes

En l’espèce, le salarié soutient que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité et de protection de la santé des salariés en ne prenant aucune mesure de prévention des risques psycho-sociaux, et illustre son préjudice par le fait d’avoir subi une dépression liée à la surcharge de travail.

Comme vu précédemment, la société Villeroy & Boch ne justifie d’aucune mesure concrète quant à la prévention des risques psycho-sociaux avant le licenciement du salarié et ni la mission confiée en 2018 à la société Mercuri international, ni l’organisation de séminaires pour les commerciaux dans des lieux qu’elle qualifie de 'prestigieux’ (à [Localité 6], [Localité 4] ou en Allemagne) ne permettent de considérer qu’elle a satisfait à son obligation de sécurité à l’égard de M. [F].

En conséquence, le préjudice du salarié à raison de ce manquement sera réparé par l’allocation de la somme de 1000 € à titre de dommages-intérêts, étant précisé que cette somme répare le préjudice distinct de celui résultant de la violation des durées maximales de travail et minimales de repos quotidien et hebdomadaire réparé ci-dessus. Le jugement sera infirmé en ce sens.

Sur le travail à domicile

Il est constant que le salarié était cadre itinérant, et que, dès le début de la relation contractuelle, il lui a été demandé d’ouvrir une ligne téléphonique professionnelle à son domicile, ainsi qu’un répondeur interrogeable à distance, conformément à l’article II de son contrat de travail.

Il est également constant qu’à compter du mois d’août 2015, son bureau toulousain a été fermé de sorte qu’il était contraint d’effectuer son travail administratif à domicile lorsqu’il n’était pas sur le terrain.

La société Villeroy & Boch rétorque qu’elle a indemnisé le salarié uniquement à partir de 2015 en raison de la suppression du bureau, et lui a réglé les sommes de 166 € pour 2015 et 500 € pour 2016, dans la mesure où les frais de connexion à internet étaient déjà pris en charge par l’employeur au moyen d’une deuxième carte SIM pour l’utiliser sur la tablette Ipad.

Force est de constater que la société Villeroy et Boch justifie avoir indemnisé le salarié en 2015 et 2016 conformément aux notes de frais qu’il a présentées, et que le salarié ne justifie pas de l’installation effective de la ligne téléphonique et du répondeur interrogeable à distance, ni d’une occupation de son domicile à des fins professionnelles à partir de 2015 telle qu’elle ouvrirait droit à une indemnisation au-delà du remboursement des frais dont il est justifié sur factures.

Ainsi, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de ses demandes de dommages-intérêts en contrepartie financière de l’usage professionnel du domicile et de dommages-intérêts pour non-respect de l’obligation de prise en charge des frais professionnels.

Sur le surplus des demandes

La société Villeroy et Boch, succombant, sera condamnée aux dépens de première instance par confirmation du jugement entrepris et aux dépens d’appel, ainsi qu’à payer au salarié la somme de 3500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, cette somme s’ajoutant à celle allouée au salarié sur le même fondement en première instance.

Dans notre prochaine actualité, vous découvrirez sur quels fondements, la Cour d’appel a  confirmé le jugement du conseil de Prudhommes et à condamné l’employeur au paiement des heures supplémentaires.

Vous êtes salarié(e), vous avez été victime d’une situation de harcèlement moral, d'une discrimination, vous avez été licencié(e) pour inaptitude d’origine professionnelle ou non professionnelle, insuffisance professionnelle, motif économique, faute grave, etc… n’hésitez pas à contacter notre cabinet d’avocats, spécialisé en Droit du travail côté salariés.

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