Depuis le 1er janvier 2017, la procédure de licenciement pour inaptitude – exceptées quelques spécificités – est identique, qu'elle soit d'origine professionnelle ou non, et la contestation de l'avis d'inaptitude relève désormais des Prud'hommes.
La loi Travail du 8 août 2016 a réformé la procédure d’inaptitude. Ces nouvelles règles s’appliquent à toute première visite médicale effectuée à compter du 1er janvier 2017. La principale nouveauté est l'alignement de la procédure de l'inaptitude d'origine non professionnelle sur la procédure d'origine professionnelle.
C’est la délivrance d’un avis d’inaptitude par le médecin du travail qui déclenche l'obligation pour l'employeur de rechercher un reclassement et, le cas échéant, la procédure de licenciement pour inaptitude (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10).
Sauf que désormais, ce constat d’inaptitude est plus encadré et ne nécessite plus d’être confirmé, sauf exception, par un double avis rendu lors de 2 visites de reprise espacées de 2 semaines. A noter que c’est toujours à compter de l’examen médical constatant l’inaptitude (et non de la date de notification de l'avis d'inaptitude) que court le délai d’un mois à l’expiration duquel, si le salarié n’est ni reclassé ni licencié, l’employeur doit reprendre le versement du salaire (C. trav., art. L. 1226-4 et L. 1226- 11).
L’exigence de 2 visites de reprise constatant l’inaptitude n'est plus le principe . Ce n’est que si le médecin du travail l’estime nécessaire pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision, qu’un second examen de reprise doit avoir lieu. Si à l’issue de la première visite de reprise, le médecin du travail estime cette seconde visite nécessaire, celle-ci doit avoir lieu dans un délai qui n’excède pas 15 jours après le premier examen. A défaut de précision, il s’agit de 15 jours calendaires. le médecin du travail ne peut déclarer un salarié inapte à son poste de travail qu’après avoir réalisé les 4 actions suivantes (C. trav., art. R. 4624-42) :
L’obligation d’échanger avec le salarié et l’employeur était implicite dans le régime antérieur et n’était pas toujours respectée, faute de temps. À la lecture du texte, seul le médecin du travail peut procéder à cet échange. Le médecin du travail déclare le salarié inapte à son poste de travail, si à la suite de ces 4 actions, il constate qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible et que l’état de santé du travailleur justifie un changement de poste (C. trav., art. L. 4624-4).
L’avis d’inaptitude rendu par le médecin du travail doit comporter des conclusions écrites, assorties d’indications relatives au reclassement du travailleur (C.trav., art. L. 4624-4).
Il peut préciser que « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ou que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’entreprise » : ces 2 mentions permettent à l'employeur de pouvoir procéder au licenciement pour inaptitude sans avoir, a priori, à rechercher un reclassement. Il doit préciser les modalités de recours pour contester cet avis ainsi que le délai de recours de 15 jours (C. trav., art. R. 4624-45). Le modèle d’avis d'aptitude ou d’inaptitude sera fixé par arrêté (C. trav., art. R. 4624-57). L'avis d'inaptitude peut être émis lors de la visite médicale ou être notifié plus tard.
En tout état de cause, il doit être notifié au plus tard à la date d’expiration du délai de 15 jours à compter du premier examen médical du salarié (C. trav., art. R. 4624-42). Cet avis est transmis au salarié ainsi qu’à l'employeur par tout moyen leur conférant une date certaine (C. trav., art. R. 4624-55).
L’employeur doit le conserver pour être en mesure de le présenter à tout moment, sur leur demande, à l'inspecteur du travail et au médecin inspecteur du travail. Une copie de l’avis ainsi que ses motifs sont versés au dossier médical en santé au travail du travailleur (C. trav., art. R. 4624-44 et 4624-55).
Par ailleurs, comme auparavant, lorsque le médecin du travail constate que l'inaptitude est susceptible d'être en lien avec un accident ou une maladie d'origine professionnelle, il remet au salarié le formulaire de demande d'indemnisation d'un mois par la CPAM prévue à l'article D. 433-3 du code de la sécurité sociale (C. trav., art. R. 4624-56). La contestation de l’avis d’inaptitude relève désormais du Conseil de Prud’hommes.
Désormais, si le salarié ou l'employeur conteste les éléments de nature médicale justifiant les avis, propositions, conclusions écrites ou indications émis par le médecin du travail après le 1er janvier 2017, il doit saisir la formation de référé du Conseil de prud'hommes d'une demande de désignation d'un médecin-expert inscrit sur la liste des experts près la Cour d'appel (C. trav., art. L. 4624-7 et R. 4624-45).
La saisine de la formation de référé doit être effectuée dans un délai de 15 jours à compter de la notification du document contesté (C. trav., art. L. 4624-7 et R. 4624-45). Le demandeur (salarié ou employeur selon le cas) en informe le médecin du travail (C. trav., art. L. 4624-1).
Le médecin-expert peut demander au médecin du travail la communication du dossier médical en santé au travail du salarié ; le secret professionnel ne pourra pas lui être opposé (C. trav., art. L. 4624-1). La formation de référé ou, le cas échéant, le Conseil de prud'hommes saisi au fond peut en outre charger le médecin inspecteur du travail d'une consultation relative à la contestation, à tout moment, y compris dans la phase de conciliation ou de délibéré (C. trav., art. L. 4624-1). La formation de référé peut décider de ne pas mettre les frais d'expertise à la charge de la partie perdante, dès lors que l'action en justice n'est pas dilatoire ou abusive (C. trav., art. L. 4624-1).
Lorsque le salarié est déclaré inapte, par le médecin du travail, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur doit rechercher un poste de reclassement, comme auparavant (C. trav., art. L. 1226-2 et L. 1226-10). Sur l’étendue de l’obligation de reclassement, la jurisprudence rendue sur la base du régime antérieur au 1er janvier 2017 est transposable dans la mesure où le texte issu de la loi Travail est rédigé dans les mêmes termes qu'auparavant sur ce point. Depuis le 1er janvier 2017, les modalités de cette obligation de reclassement sont identiques que l'inaptitude soit d'origine professionnelle ou non, notamment :
La Cour de Cassation réaffirme de l’obligation pour l’employeur de reprendre le paiement du salaire dans le délai d’un mois à compter de la date de l’examen médical de reprise, lorsque le salarié déclaré inapte par le médecin du travail n’est ni reclassé ni licencié
Pour en savoir plus: Arrêts liés Inaptitude au travail - Obligation de reclassement – Refus du salarié de la proposition d'un emploi adapté –Absence de caractère abusif
"La circonstance que l'employeur est présumé avoir respecté son obligation de reclassement en proposant au salarié déclaré inapte un emploi prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail ne le dispense pas de verser au salarié, qui a refusé cette proposition de reclassement et qui n'a pas été reclassé dans l'entreprise à l'issue du délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise ou qui n'a pas été licencié, le salaire correspondant à l'emploi qu'il occupait avant la suspension du contrat de travail"
SOC., 10 JANVIER 2024, POURVOI N° 21-20.229
Depuis le 1er janvier 2017, le licenciement pour inaptitude, que l’inaptitude soit d’origine professionnelle ou non, doit reposer sur l’un des quatre motifs suivants :
Si la procédure de l’inaptitude d’origine non professionnelle est désormais alignée sur celle de l’inaptitude d’origine professionnelle, il reste quelques particularités liées à l’inaptitude d'origine professionnelle : le droit pour le salarié à une indemnisation temporaire, l’indemnité temporaire d’inaptitude (ITI) servie par la CPAM après le constat de son inaptitude (CSS, art. D. 433-4) ; le droit à une indemnité spéciale de licenciement majorée et au versement de l’indemnité compensatrice de préavis (C. trav., art. L. 1226-14) ; des sanctions plus lourdes lorsque le licenciement est sans cause réelle et sérieuse (C. trav., art. L. 1226-15)