Une clause de non-concurrence est très souvent insérée dans un contrat de travail, visant d’une part à limiter la liberté d’exercer du salarié, après la rupture de son contrat, dans une entreprise concurrente et d’autre part à protéger les intérêts légitimes de l’entreprise.
Pourtant, en pratique, ces clauses sont souvent illicites et contestables, ne respectant pas les conditions de validité en vigueur.
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La clause de non-concurrence n’est pas définie par la loi. En revanche elle est encadrée par un ensemble de décisions jurisprudentielles.
Elle est classiquement désignée comme une clause insérée dans le contrat de travail par laquelle le salarié s’engage à ne pas exercer, pendant une période déterminée à partir de la cessation de la relation de travail, une activité concurrente à celle de son employeur pour son propre compte ou celui d’un autre employeur.
L’article 15 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne consacre la « liberté professionnelle » et le « droit de travailler ».
« 1. Toute personne a le droit de travailler et d’exercer une profession librement choisie ou acceptée
2. Tout citoyen de l’Union a la liberté de chercher un emploi, de travailler, de s’établir ou de fournir des services dans tout Etat membre »
La Cour de cassation, dans le cadre des dossiers lui étant soumis, cherche un équilibre entre la protection des intérêts de l’entreprise et le « principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle ».
En effet, il est jugé depuis un arrêt du 31 mars 1981 que la clause de non-concurrence ne doit pas avoir pour objet de placer le salarié « dans l’impossibilité absolue d’exercer de façon normale une activité conforme à ses connaissances et à sa formation ».
La clause de non-concurrence doit donc permettre à l’employeur de se prémunir contre d’éventuels agissements concurrentiels de son salarié, au moment de la rupture de son contrat de travail, sans pour autant priver le salarié de son droit de travailler.
Pour autant, la clause de non concurrence vient limiter la liberté du travail. C’est pourquoi la jurisprudence a posé des conditions de validité afin d’encadrer cette atteinte.
Par des arrêts de principe du 10 juillet 2002, confirmés plus récemment à de multiples reprises, la Cour de cassation pose les critères de validité, cumulatifs, d’une clause de non-concurrence :
Quelques précisions jurisprudentielles …
Pour être valable, la clause de non-concurrence doit figurer dans une clause du contrat de travail ou être prévue par la convention collective applicable. Le salarié doit avoir été informé de son existence au moment de son embauche. Il a été jugé en ce sens que la contrepartie financière est due même si elle ne figure pas dans le contrat de travail, mais que celle-ci renvoi sans autre précision à l’article de la convention collective qui la fixe (Cass. soc. 21 octobre 2020).
La contrepartie financière ne peut pas être conditionnée, par exemple à l’absence de faute du salarié.
Si la clause prévoit une indemnité inférieure en cas de démission, cette réduction ne sera pas applicable (Cass. soc. 21 octobre 2020).
Le juge ne peut pas réduire le montant de la contrepartie financière en cas de litige (Cass. soc. 13 octobre 2021).
Même dans le cas d’une clause de non-concurrence limitée dans le temps et dans l’espace, le juge doit contrôler sa proportionnalité vis-à-vis des intérêts légitimes de l’employeur (Cass. com. 13 mars 2014).
Par exemple, une clause de non-concurrence de 30km autour d’un point de vente, pour un emploi doté d’un savoir-faire de faibles technicité et spécificité n’apparaît pas indispensable pour assurer la protection de l’intérêt de l’entreprise (CA Paris 28 juin 2023).
La clause de non-concurrence s’applique au moment de la rupture du contrat de travail.
Elle s’applique quel que soit le mode de rupture du contrat de travail ex : démission, licenciement, rupture conventionnelle.
L’employeur est tenu de respecter les modalités de renonciation à la clause de non-concurrence fixées dans le contrat de travail ou la convention collective.
Cette renonciation doit se faire de manière expresse et par écrit.
En l’absence de dispositions contractuelles ou conventionnelles, l’accord du salarié est nécessaire.
De ce fait, l’employeur ne peut pas renoncer unilatéralement à l’exécution de la clause de non-concurrence. A défaut, la renonciation sera inopposable au salarié. Dans le cadre d’un contentieux il serait alors fondé à demander une indemnité financières accompagnée des congés afférents.
Dans un arrêt du 15 novembre 2023 (n°22-18.632), la Cour de cassation juge que la dispense tardive de l’obligation de non concurrence par l’employeur, suite à un licenciement pour faute grave, ne le décharge pas de son obligation de verser une contrepartie financière au salarié.
En revanche, la contrepartie n’est due que pendant la période durant laquelle le salarié a effectivement respecté ou « a été à même » de respecter ladite clause.
A cette occasion, la Haute juridiction rappelle qu’il incombe à l’employeur qui se prétend délivré de l’obligation de payer la contrepartie financière de la clause de non-concurrence d’apporter la preuve de la violation de la clause par le salarié, conformément à l’article 1353 du Code civil.
Lorsque l’employeur ne respecte pas la clause de non-concurrence, le salarié est alors libéré de son obligation.
L’employeur peut également être condamné par le Conseil de prud’hommes au versement de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, lorsque la clause de non-concurrence est jugé « nulle ».
L’employeur reste tenu, en sus, de verser la contrepartie financière durant toute la période prévue par la clause de non-concurrence.
L’annulation de la clause n’a pas d’effet rétroactif, le salarié conserve les sommes versées.
Des employeurs ont tenté de contourner l’application des conditions de validité d’une clause de non-concurrence en intégrant au contrat de travail une « clause de respect de la clientèle ».
Il s’agit d’une clause ayant pour finalité d’empêcher un salarié d’entrer en contact avec la clientèle de son employeur après la rupture de son contrat de travail, et ce sans contrepartie financière.
La Cour de cassation a alors jugé que la clause de respect de la clientèle devait être assimilée à une clause de non-concurrence et donc rendue illicite en cas de non-respect des critères de validité dégagés par la jurisprudence (contrepartie financière, la délimitation dans le temps et dans l’espace, l’intérêt légitime pour l’entreprise etc.).
« Une clause selon laquelle il est fait interdiction à un salarié, durant une période déterminée, d’entrer en relation, directement ou indirectement, et selon quelque procédé que ce soit, avec la clientèle qu’il avait démarchée lorsqu’il était au service de son ancien employeur est une clause de non-concurrence ; que cette clause n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives » (Cass.soc. 9 juin 2015 n°13-19.327)
La clause de respect de la clientèle doit être requalifiée en clause de non-concurrence.
Il est important de faire une distinction entre une clause de non-concurrence et la notion de concurrence déloyale.
Dans le cas d’une clause de non-concurrence, le salarié est tenu d’une obligation contractuelle de non concurrence.
Dans le cas de la concurrence déloyale, la concurrence n’est pas interdite mais son exercice peut être qualifié de fautif.
Exemple : La Cour d’appel de Versailles, après avoir rappelé les conditions de validité d’une clause de non-concurrence, a annulé la clause litigieuse la jugeant disproportionnée par rapport à l’intérêt légitime de la société. La clause en question interdisait toute relation commerciale avec un client pendant une durée de 12 mois, sauf à devoir régler une indemnité importante, alors que la mission confiée au salarié était d’une durée de 3 mois sans renouvellement possible. Néanmoins, le salarié (ici prestataire) a été condamné à verser des dommages-intérêts pour manquement à son obligation d’exécuter le contrat de bonne foi. En effet ce dernier avait profité de la mission confiée par la société pour conclure 8 contrats avec le client concerné pour son compte personnel (CA Versailles 14 septembre 2023).
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