Annulation des conventions de forfait et heures supplémentaires

Vous avez signé une convention de forfait en jours et vous pensez que vous ne pouvez pas réclamer le paiement de vos heures supplémentaires. Ce n'est pas le cas ! Dans de nombreux cas, les juges annulent ces conventions de forfait jours.

L'annulation de la convention de forfait en jours permet au salarié (cadre ou non cadre) de réclamer le paiement des heures supplémentaires impayées sur les trois dernières années (prescription triennale des créances salariales).

Pour être valables, les conventions de forfait en jours doivent être prévues par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées raisonnables de travail, notamment par un suivi effectif et régulier de l’employeur. A défaut elles violent le droit à la santé garanti par la Constitution et la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

La Cour de cassation juge ainsi qu'un seul entretien annuel sur la charge de travail est insuffisant. Elle juge aussi que les systèmes "auto-déclaratifs" des heures et/ ou jours travaillés sont insuffisants.

Elle juge encore que l'employeur doit prévoir un dispositif d'alerte de la hiérarchie permettant d'éviter une surcharge de travail. Dans les faits, ces obligations cumulatives sont rarement respectées par l'employeur, rendant la convention de forfait nulle. Les exigences de la Cour de cassation se trouvent consolidées par la loi n° 2016-1088, dite « loi Travail », du 8 août 2016.

En effet, l’article L. 3121-60 du code du travail dispose que :

« L’employeur s’assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail ».

Le Code du travail précise, en outre , que l’accord collectif doit comporter « les modalités selon lesquelles l’employeur assure l’évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié » ainsi que « les modalités selon lesquelles l’employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail du salarié » (C. trav., art. L. 3121-64, II).

Dans une nouvelle décision du 6 novembre 2019 (pourvoi 18-19.752), la Cour de cassation confirme sa jurisprudence sur la nullité des conventions de forfait qui ne protègent pas la santé et entrainent une charge excessive de travail.

Vu l'alinéa 11 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, l'article L. 3121-45 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, interprété à la lumière de l'article 17, §§ 1 et 4, de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, § 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Attendu, d'abord, que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles ;

Attendu, ensuite, qu'il résulte des articles susvisés des directives de l'Union européenne que les États membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ;
Attendu, enfin, que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et indemnité pour travail dissimulé, l'arrêt retient que, sans remettre en cause les dispositions de la convention collective applicable prévoyant une rémunération forfaitaire pour les cadres dits « autonomes » prévoyant un nombre de jours travaillés de deux cent sept jours auxquels, nécessairement vient s'ajouter la journée de solidarité, le salarié soutient que les dispositions de son contrat de travail étaient irrégulières en ce qu'elles ne mentionnaient ni les modalités de décompte des journées ou demi-journées travaillées, en ce que le nombre de jours annuels était fixé à deux cent huit alors que la convention collective les limite à deux cent sept et en ce qu'aucun entretien individuel n'était mis en place pour l'exécution de la convention de forfait, que toutefois, d'une part, la stipulation du contrat de travail fixant à deux cent huit le nombre annuel de jours de travail n'est pas irrégulière au regard de la convention collective dès lors que doit être prise en compte la journée de solidarité, que d'autre part, s'il est vrai que, aux termes de l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, dans les circonstances spécifiques de l'espèce, l'association est fondée à soutenir que, alors que le salarié en qualité de directeur salarié, avait la charge de s'assurer du respect par l'association de la réglementation sociale, notamment en ce qu'elle vise la durée du travail et son aménagement, la contestation par celui-ci du respect des règles dont il avait la charge, est faite de mauvaise foi ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 9 de la convention collective nationale des organismes gestionnaires de foyers et services pour jeunes travailleurs du 16 juillet 2003 prévoit que, pour les directeurs, l'organisation du travail peut retenir le forfait en jours dans la limite de deux cent sept jours par an, que l'avenant n° 2 du 21 octobre 2004 à cette convention collective, relatif à l'aménagement du temps de travail des cadres, se limite à prévoir, en son article 2, que dans l'année de conclusion de la convention de forfait, la hiérarchie devra examiner avec le cadre concerné sa charge de travail et les éventuelles modifications à y apporter, que cet entretien fera l'objet d'un compte rendu visé par le cadre et son supérieur hiérarchique, que les années suivantes, l'amplitude de la journée d'activité et la charge de travail du cadre seront examinées lors de l'entretien professionnel annuel, en son article 3 que les jours travaillés et les jours de repos feront l'objet d'un décompte mensuel établi par le cadre et visé par son supérieur hiérarchique qui devra être conservé par l'employeur pendant une durée de 5 ans, que ces dispositions, en ce qu'elles ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs de temps travaillé transmis, permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, ce dont il se déduisait que la convention de forfait en jours était nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. R... de ses demandes de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, congés payés afférents et indemnité pour travail dissimulé

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